top of page
Gali Eilon Kfar Aza 1.png
N12.png

L’héroïsme est une affaire de famille : Le matin du 7 octobre, lorsque la plus terrible attaque de l’histoire d’Israël a commencé, la famille Eilon étaient répartis dans deux maisons à Kfar Aza, leur kibboutz.D’un côté, le père, Tal, commandant du groupe d’intervention (“kitat konenout“ le groupe de défense du kibboutz qui comptait 12 hommes), son épouse et leurs deux jeunes fils ; de l’autre, leur fille aînée, Gali, qui séjournait chez sa grand-mère et ses oncles et tantes.

Ce matin-là, Gali a été surprise par les sirènes d’alerte et les messages qu’elle recevait des groupe WhatsApp qu’elle partageait avec les jeunes de son âge dont l’un avait même pris en photo des terroristes qui s’introduisaient en parapente dans le kibboutz.


«Au début,» raconte-t-elle, «je me suis dit qu’il s’agissait de quelqu’un qui revenait de la mer en parapente, et qui avait dû atterrir à l’intérieur du kibboutz lorsqu’il avait entendu l’alerte “Tseva adom“».
 

Pendant ce temps, dans la première maison, son père, Tal recevait un message annonçant l’intrusion de terroristes.
«Je l’ai vu s’organiser“, raconte son épouse, “crier des choses au téléphone et nous hurler : “Ce n’est pas le moment de jouer les héros, courez dans la chambre sécurisée (“mamad“). J’ai couru avec les garçons, nous avons fermé la porte et à partir de ce moment nous n’avons plus bougé».

 

«Mon frère Roy m’a alors écrit que Papa avait été appelé et qu’il avait dit qu’il ne s’agissait pas de jouer les héros, et que nous devions simplement attendre dans le mamad, jusqu’à ce que tout soit terminé“ reprend Gali.
 

À partir de ce moment deux actes d’héroïsme vont se dérouler : Tal va sortir pour se battre avec son groupe et sauver au prix de sa vie beaucoup d’habitants du kibboutz ; Gali qui, suivant les ordres de son père, va se cacher avec sa cousine dans la chambre sécurisée, ne sait pas encore qu’elle est sur le point de devenir une carte maîtresse dans le sauvetage de nombreuses familles .

​

L’histoire de Gali

 

«Il y avait beaucoup de combats autour de la maison de ma grand-mère. On entendait des coups de feu très proches, non-stop… Les fenêtres de la maison ont été fracassées. On était sûrs que c’était de Tsahal, jusqu’à ce qu’on se rende compte que c’était de terroristes.

​

Lorsqu’ils sont entrés dans la maison, j’ai cru un moment qu’ils allaient pénétrer dans le mamad, alors ma cousine et moi nous nous sommes cachées sous le lit. J’étais convaincue que si ils entraient, la distance entre la vie et la mort tenait dans l’espoir qu’ils ne regarderaient pas vers nous.»


Les soldats de Douvdevan ont été les premiers à arriver au kibboutz.

S. l’un d’eux raconte ainsi ces premiers instants : «Le chaos était fou. Nous sommes habitués aux situations extrêmes, mais comme celle-là, jamais. Nous avons essuyé les premiers tirs avec un groupe important de terroristes qui se trouvaient dans la première rangée de maisons. Nous n’avons pas vraiment saisi la gravité de la situation, nous avons juste compris qu’il fallait faire feu et sauver les habitants.


Il décrit ensuite des combats acharnés et la rencontre avec Gali : «Au moment où nous avons atteint la troisième maison, nous avons été la cible de tirs nourris venant de tous les côtés. J’ai alors vu des camarades allongés sur le sol, trois étaient blessés, 2 avaient été tués. Les choses se compliquaient, nous savions que nous devions continuer à avancer et les 15 minutes qui ont suivi ont duré une éternité. Ceux qui survivaient se sont traînés dans la maison et nous avons traîné les autres».
«Le salon dans lequel nous sommes arrivés était chaud et confortable… Nous avons immédiatement renversé les canapés et les tables afin de sauver nos camarades le plus rapidement possible et de traiter avec le plus grand respect ceux pour lesquels nous ne pouvions plus rien. Ce n’est pas normal de voir un ami, toujours présent pour vous… mort.

 

Le chaos se poursuivait pour S. et ses compagnons de combat qui avaient trouvé un abri temporaire dans la maison dans laquelle se trouvait Gali.
«Personne ne comprenait ce qui se passait. C’était la pagaille ! Nous savions que des civils allaient être massacrés ou enlevés et nous ne savions pas ce que nous allions faire avec les autres «, explique-t-il.

 

Au même moment, la jeune fille de 15 ans, qui se cache sous le lit, commence à entendre des voix parler en hébreu entre des coups de feu et les cris en arabe. Les soldats frappent à la porte, s’identifient et tentent de calmer la famille effrayée. Lorsqu’ils entrent, Gali qui comprend leur détresse et leur besoin d’en savoir plus sur ce qui se passe à l’extérieur, a une idée :
«Ils avaient besoin de savoir s’il y avait plus de blessés et où se trouvaient les terroristes.
J’ai alors réalisé qu’il ne servirait plus à rien de rester sous le lit. Il fallait être dehors, essayer de se battre et d’aider d’autres personnes.
J’ai dit aux soldats que nous avions des groupes WA au kibboutz, et j’ai proposé de rassembler toutes les localisations de ceux qui signaleraient des blessés ou des terroristes chez eux.»

 

Les soldats qui se trouvent dans une situation totalement inédite, acceptent l’offre de Gali avec enthousiasme.

Elle commence alors à rassembler toutes les informations essentielles pour eux et, plus important encore, à les mettre en contact avec les membres du kibboutz qui, à ce moment-là, ont réalisé que les terroristes étaient partout et ne faisaient plus confiance à personne.
«Tout le monde était terrifiés, tout avait été saccagé, hacké. C’était très compliqué de faire entendre que nous n’étions pas des terroristes, mais Tsahal“, explique S.

“C’est alors que Gali a commencé à écrire à tous les groupes pour leur dire de ne pas s’inquiéter. Elle a enregistré des messages pour eux, afin qu’ils entendent nos voix».

​

Auriez-vous pu imaginer qu’une jeune fille de 15 ans vous aiderait à mener une bataille ?

​

​

«Non. Nous n’avons jamais pensé que cela pourrait arriver. Et je ne pense pas qu’elle ait réalisé l’acte courageux qu’elle accomplissait.»
​

​

Quel rôle a-t-elle joué à ce moment-là au sein des FDI ?

​

«Quelque chose entre chef des opérations (Kambatzit) et guerrière...


S. poursuit et décrit comment Gali fonctionnait :
«Elle s’est assise avec nous et nous a montré exactement où quelque chose se passait, tout ce qui n’était pas normal. Elle a commencé par pointer sur les cartes les endroits où il y avait des problèmes, où des gens entendaient marcher dans leur maison ou des atrocités que nous devions absolument arrêter.»


«Grâce à Gali, l’unité a fonctionné en parfaite synchronisation“, ajoute un autre soldat. “Elle nous a aidé à atteindre les points les plus sensibles, là où les terroristes étaient les plus nombreux, à les éliminer et à faire sortir les familles. Elle nous a permis de sauver beaucoup de vies.»


La tante de Gali confirme : «Gali dirigeait les opérations. Elle seule possédait un téléphone qui fonctionnait et elle était la seule à être capable de “cartographier“ le kibboutz pour les soldats, au milieu des massacres et de l’horreur, grâce à toutes ses conversations WhatsApp.»


Les soldats  qui se trouvaient dans la maison avaient commencé à se préparer à plier bagage. Grâce à Gali, ils ont réalisé qu’ils avaient des tâches plus urgentes. Ils ont quitté la famille Eilon lorsque leur maison a été considérée comme nettoyée des terroristes – en fait, malheureusement, pas pour longtemps.


«Les heures filaient comme si rien ne s’était passé et personne ne venait“, reprend Gali. “Mes amis m’écrivaient qu’ils avaient été secourus. Mais quand la nuit est tombée, je me suis dit : “‘Wow, ce n’est pas bon’. J’ai pensé qu’il était plus difficile de se battre la nuit… Nous n’avions plus d’électricité ; il faisait noir dans notre petite pièce, on n’y voyait plus rien».
Liora, sa grand-mère ajoute : «Nous étions tous épuisés. Durant toutes ces heures, nous avions peu dormi, peu mangé, et nous manquions d’air. Les bougies que les soldats nous avaient apportées s’étaient éteintes à cause du manque d’oxygène, nous étions vraiment en danger».
«Nous étions déjà en partie inconscientes», continue la tante de Gali. «Je me suis allongée sur le lit et j’ai dit à mon frère de garder la porte à son tour, car je n’en pouvais plus. Nous avons alors demandé à Gali d’écrire aux soldats pour qu’ils viennent nous sauver. Elle a répondu : «Attendez, il y a encore des combats dans le quartier des “jeunes“, je ne peux pas écrire maintenant». Puis un soldat a contacté Gali, et on a pensé qu’on allait être évacués. Mais c’est alors qu’elle a accompli un autre acte héroïque».


«Un soldat m’a appelée» raconte Gali. «Il m’a dit qu’ils nous attendaient pour nous sortir de là. J’ai regardé autour de moi et j’ai vu que j’allais bien, que grand-mère allait bien, qu’aucun de nous n’était blessé. Les soldats sont passés nous apporter de l’eau - certains d’entre nous n’avaient rien bu depuis le dîner du vendredi. Je leur ai dit qu’il y avait des blessés dans le quartier des “jeunes“ et qu’ils devaient aller les voir. C’était une décision un peu difficile à prendre, mais nous avons fait ce qui était nécessaire».


Après de longues heures difficiles, la mère et le petit frère de Gali ont enfin été secourus.
«L’obscurité était absolue et les tirs incessants sur le “mamad“, raconte la maman. «J’ai aménagé une place dans le placard pour nous cacher au cas où les terroristes viendraient et nous tireraient dessus. À ce moment-là, je ne pensais pas que quelqu’un pourrait encore nous sauver. Pourtant c’est ce qui s’est passé.
Nous avons été évacués vers la station-service et j’ai couru avec Roy jusqu’au bureau pour recharger mon téléphone, puis j’ai dit : «Nous devons vérifier ce qui se passe avec Gali».
Un soldat m’a entendu et m’a dit : «Quelle Gali ? Notre Gali ?».
Il m’a montré une photo sur son téléphone, s’est levé d’un bond et a appelé tous ses amis. Ils m’ont tous sauté dessus et je n’ai pas compris ce qui se passait, ils m’ont juste dit que ma fille était une héroïne.»


Voilà plus de 30 heures que les terroristes sont entrés dans le kibboutz.
Gali et les membres de sa famille attendent toujours d’être secourus.
Les terroristes se rapprochent à nouveau de leur maison puis y pénètrent. Lorsqu’elle comprend que ce sont peut-être ses derniers instants, elle envoie un message d’adieu à sa maman :
«Je t’aime plus que tout au monde»…
Et les secours arrivent enfin. Ce sont les forces de Givati (une autre unité d’élite) que les combattants de Douvdevan, qui n’ont pas oublié la jeune fille héroïque qui les a aidés, envoient à la rescousse.  


Au cours d’une opération de sauvetage dangereuse (comme des boucliers humains, les soldats vont former un barrage de leur corps) la famille se retrouve en sécurité à la station-service. À ce moment Gali qui se rend compte qu’il y a des familles qui ont encore besoin d’aide, se retrouve à nouveau à diriger les soldats :
«Je voulais m’assurer que les tout le monde allait bien. Alors j’ai envoyé beaucoup de localisations et de plus en plus de personnes qui avaient été localisées sont arrivées.
Mais ce n’était pas grâce à moi, c’était grâce aux soldats.»

 

C’est aussi probablement grâce à vous, car pour eux vous êtes aussi une héroïne.

 

 

«Avec tout le respect que je vous dois, je ne suis pas une héroïne, je suis une survivante. Héros est un titre qui a beaucoup de sens et je pense que mon père était un héros.»

 


Finalement, après un cauchemar de 35 heures, Gali et sa famille sont réunis avec sa mère et ses jeunes frères. C’est alors qu’elle va alors découvrir que Tal, son papa n’est plus.
«Je me disais qu’il avait été kidnappé, qu’il reviendrait et nous raconterait tout ce qu’il avait enduré et comment il s’était battu. Mon père adorait rire, j’étais sûre qu’il nous raconterait des blagues et qu’il se moquerait des terroristes. Jusqu’à ce que nous apprenions qu’il avait été identifié parmi les morts ramenés de Kfar Aza. Lui est un vrai héros. S’il y a quelqu’un dont je n’avais pas à me soucier, c’était bien mon père, parce qu’il se débrouillait partout et que personne ne pouvait l’aider. C’était hélas un peu perdu d’avance, 12 membres de l’équipe d’urgence contre une centaine de terroristes…» raconte douloureusement Gali.
Le kibboutz Kfar Aza a perdu pendant ce shabbat noir plus de 60 membres qui ont été assassinés, 19 ont été kidnappés et beaucoup d’autres ont été blessés. Dans le groupe d’intervention, sept membres sont tombés, dont Tal Eilon, le commandant du groupe, le père de Gali.


Pensez-vous que votre père serait fier de vous pour ce que avez fait ce shabbat-là ?


«Mon père a toujours été fier de moi, il m’a éduqué de son mieux.
J’espère vraiment qu’il savait que dans tout ce que je faisais, je pensais à lui.
Même quand  je faisais des erreurs, il continuait à être fier de moi.
Mon père était un roi, il n’y a personne comme lui et il n’est plus.

 

Il n’aurait pas voulu que nous restions assis à pleurer sans fin, alors nous essayons de sourire et nous construirons lentement le kibboutz pour lequel il s’est battu, et tout ira bien».

​




 

bottom of page